→ CINÉMA

AIMER, BOIRE ET CHANTER

Aimer boire et chanter  affiche

Aimer boire et chanter  Tamara et Simeon 280

aimer boire et chanter Monica et Siméon 280

aimer boire et chanter Colin et Kathryn


POUR LES VIVANTS QUI VEULENT LE RESTER!

Texte: Valérie Lobsiger


Un film d'Alain Resnais
6e film de la série French Touch, (F.2013, 1h48)

Sur les écrans suisses alémaniques à compter du 7 août 2014

Présenté en présence du producteur Jean-Louis Livi et l'actrice Caroline Sihol au cinéma Le Paris, à Zh, à 12h15, le 4 juillet 2014


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«Who does not Love Wine Wife and Song will be afool for his Lifelong!»

LA VIE EST UNE PIECE DE THEATRE dont chaque acteur connaît la fin, ce qui ne l’empêche heureusement pas de croire qu’il peut improviser. Voilà ce qu’on conclut de ce dernier film d’Alain Resnais, décédé le 2 mars dernier à 91 ans, soit encore en pleine verdeur si on en juge les clins d’œil que le facétieux cinéaste ne cesse de nous adresser comme pour nous inciter à ne rien prendre au pied de la lettre, aussi bien dans son film que dans la vraie vie. L’ami George mourra dans six mois. C’est la nouvelle que laisse échapper Colin (Hippolyte Girardot), médecin, en parlant avec sa femme Kathryn (Sabine Azéma). Celle-ci transmet aussitôt la nouvelle à Jack (Michel Vuillermoz), le meilleur ami de George, qui l’annonce à sa femme Tamara (Caroline Silhol). Ils décident ensemble d’intégrer George dans leur petite troupe de théâtre, histoire de lui changer les idées. Sauf que George, interprétant un amoureux du personnage de Tamara sur scène, en profite pour flirter avec elle. Jack prévient alors Monica (Sandrine Kiberlain), l’ancienne épouse de George qui est partie vivre avec l’agriculteur Siméon (André Dussolier), pour la faire revenir auprès de George, sous le prétexte d’adoucir ses derniers jours. Mais Kathryn, dont George fut le premier amant, a eu la même idée, tout comme Tamara, et les trois femmes se retrouvent en compétition pour obtenir l’exclusivité de George. Un George qu’on ne verra jamais, mais qui a l’air décidément en pleine forme…

IL NE DEPEND QUE DE NOUS DE CRÉER UNE NOUVELLE REALITE. Le décor est posé (la campagne du Yorkshire) et même redessiné (par le bédéaste Blutch) et même réaménagé en scène de théâtre (par le chef décorateur Jacques Saulnier) avec des tentures peintes en lieu et place des portes, des fleurs et du gazon artificiels… Et pourtant la marge de manœuvre existe. Elle est à trouver au fond de nous, en puisant dans ce que nous avons de plus précieux : notre fantaisie. Une ultime fois, Resnais se rit de la vaste comédie humaine, à partir de Life of Riley, une pièce récente (2010) du fameux dramaturge anglais Alan Ayckbourn. La vie de couple tue-t-elle l’amour? Une femme peut-elle espérer garder un homme en se contentant de lui laver son linge sale? La mort est-elle plus douce entouré de ses amis? Quel est le secret de George? Son charme tient-il au fait qu’il sait, lui, donner aux femmes l’illusion d’abolir le temps pour elles (contrairement à Colin, obsédé par les horloges)? Que cherche au juste George en mentant à tout le monde? Et puis d’abord, ce George, existe-t-il vraiment?! On se pose bien des questions durant ce film déroutant. En tout cas, une chose au moins est certaine : ce n’est pas parce qu’on finit tous par mourir, généralement d’ailleurs de quelque chose d’autre que ce qu’on croyait (comme George), qu’il faut renoncer à la légèreté, l’imprévu, la gaieté.

(VL 2.07.2014)