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LA PETITE RAPPORTEUSE

GAEL FAYE ET daniel binswanger 3Gaël Faye au Karl der Grosse avec Daniel Binswanger le 26 octobre 2017

Ajar cab 280AJAR au Cabaret Voltaire le 28 octobre 2017 - Photos scz

 


CAR
LOTTA ÉCRIT AUSSI SON JOURNAL

Texte: Dona Carlotta


OCTOBRE 2017, PAS ROUGE MAIS COLORÉ

Une multitude d'auteurs francophones passe par Zurich...


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Lundi 6 novembre:
«GREED IS RIGHT. Greed works.» Gordon Gekko dans «Wall Street» d'Oliver Stone, passé sur Arte hier soir le clame.
A la radio, comme en échos, on dévoile un nouveau scandale qui porte un joli nom: Paradis Paper.
Qui a dit que le journalisme était moribond? Qui a dit qu'ils n'iraient pas tous au paradis?

Samedi 28 octobre:
AJAR, VOUS AVEZ DIT AJAR? 
Que se cache-t-il derrière ce collectif (Association des Jeunes Auteurs Romands) venu au Cabaret Voltaire, non pour nous parler  d'Emile ou de Rousseau, mais bien d'Esther, Esther Montavon. Une auteure qu'ils ont créée de toutes pièces et collectivement. Leur performance en deux langues illustre leur façon de travailler et montre comment leur roman «Vivre sous les tilleuls» est né: remarques des traducteurs et résultats finaux du texte en allemand, l'un d'entre eux fournit un texte de base sur un sujet prédéfini, le groupe le corrige, le remanie. A la fin, il est impossible de reconnaître l'auteur de base. Le texte est devenu véritablement le fruit d'un travail collectif. Pour Ajar: «La fiction n'est absolument pas le contraire du réel». Et au Cabaret Voltaire on a rééellement vu et entendu le texte (re)naître... et la notion d'auteur se dissoudre dans le collectif.

Vendredi 27 octobre 2017:
OBSERVATION À HAUTEUR MICROSCOPIQUE
Gaël Faye était hier à Zurich. Que dire? Que l'homme est tout aussi touchant et intelligent sinon plus, que son roman, «Petit pays»?
Dès le début de la rencontre, il ne mâche pas ses mots: les ethnies sont des constructions coloniales. C'est la colonisation qui a fait un travail de sape de la culture burundaise et rwandaise et ce travail de sape a été intégré par les populations elles-mêmes. Autre avertissement, ce livre ne donnera donc aucune réponse sur le conflit et ses questions ethniques. On connaît la couleur dès le prologue.

Mais dans «Petit pays», il y a aussi tout le reste, l'observation fine de l'enfance et de la société urbaine très diversifiée, l'irruption de la violence qui ne se fait pas d'un coup, mais que Gabriel, le narrateur, observe à la hauteur microscopique qui est la sienne. A petite touche et avec justesse. Enfin, l'importance des livres, comme remparts à la barbarie.

Oui, c'était une belle soirée.
Dommage peut-être que les textes lus en allemands aient pris autant de temps. On aurait aimé entendre davantage l'auteur, qui sait même l'entendre chanter en acoustique?
Ce n'est que partie remise. (Il sera le mardi 21 novembre à la Maison du Peuple, à Bienne, mais c'est déjà complet).

Jeudi 26 octobre: HOMO ECONOMICUS EST-IL DANGEREUX? Un plaidoyer pour la réintroduction de la littérature et des sciences humaines dans les cursus économiques.
Les économistes ont-ils façonné une créature qui leur échappe?
Comme Marie Shelley a créé Frankenstein, un monstre qui devient destructeur, Pareto a-t-il donné naissance à un Homo economicus qui, sorti de l'abstraction universitaire et théorique a abouti dans le monde réel à un type incontrôlé et incontrôlable, le Gordon Gekko d'Oliver Stone? Comment faire marche arrière et détrôner la vision à court-terme du monde, la maximisation des profits tout en retrouvant une société basée sur la confiance? Les professeurs Marc Chesney et Pierre Labarthe de l'Université de Zurich ont invité Paul Dembinski qui dirige l'Observatoire de la Finance à Genève et enseigne à l'Université de Fribourg. 
Son propos? Il ne faut pas réduire toute chose à son équivalent monétaire, il faut réintroduire du sens et de l'éthique dans l'enseignement de la finance, du management et de l'économie. Concrètement, la littérature, ne devrait pas être absente du cursus en finance et en économie. Car à l'homo économicus, il faut rajouter l'homo reliogiosus, l'homo ethicus ... pour obtenir l'homme tel qu'il existe concrètement dans la réalité. Ce découpage est intéressant en tant que modèle, mais il doit être dépassé. Toutes les parties qu'on avait séparées pour mieux les étudier, doivent à nouveau être réunies! Une histoire de puzzle pas fini, quoi!

Vendredi 20 octobre: Boualem Sansal est à la Literaturhaus. Son roman 2084 est une distopie qui non seulement nous fait voyager dans le temps, mais surtout entend nous  ouvrir les yeux. Que se passerait-il si un Etat théocratique prenait le pouvoir par la force et la violence?
Comment réagirions-nous face à l'appauvrissement et au rétrécissement du monde proposé par un tel régime?
Pour l'auteur, c'est maintenant et en Occident qu'il faut prendre conscience du possible danger à venir. Il faut cesser de se cacher derrière le politiquement correct et retirer les muselières!