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JOSEPH STIGLITZ À L'UNIVERSITÉ DE ZURICH

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Comment faire pour que les pratiques actuelles ne pénalisent pas (trop) les générations futures? Comment garantir l'égalité intergénérationnelle?

Quelles politiques (au plan national et international) mettre en œuvre pour amortir les conséquences sociales de la transition verte?

Quel rôle la finance a-t-elle à jouer dans ces transformations en profondeur?

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UZH - Zurich le 17 janvier 2020 - Photo Madeleine Ludwig - Joseph Stieglitz en compagnie de Stefano Battiston (UZH)

 


L'URGENCE D'UNE TRANSITION VERTE

Texte: Laurence Hainault Aggeler


En savoir plus sur cette conférence: https://www.finexus.uzh.ch/en/events/finexus2020-conference.html

Le flyer: ici

Le titre de sa conférence du 16 janvier 2020 à Zürich: «CLIMATE CHANGE AND RISK»

Parution :
«Peuple, pouvoir et profits», septembre 2019: le dernier livre de Joseph Stiglitz traduit en français

Rapport Stern/Stiglitz, 29 mai 2017, résumé en français : ici


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L’Université de Zurich invite le Prix Nobel d’économie, Joseph Stiglitz
 
Le 16 janvier dernier, à l’Université de Zurich, s’est ouvert un nouveau centre d’enseignement et de recherche sur la finance durable (Center of Competence for Sustainable Finance – CCSF). Pour l’inaugurer, deux jours de réflexion, discours et débats à la clef, ont rassemblé des spécialistes autour du thème des risques financiers liés au changement climatique. A 17h, le célèbre prix Nobel d’économie 2001, Joseph Stiglitz, nouveau Président du Conseil scientifique, a donné une conférence ouverte au public.

Certains ont pu rejoindre les congressistes dans le bel amphi du deuxième étage. D’autres ont suivi une retransmission sur grand écran dans les salles voisines. Mais pour tous, l’ambiance était  décontractée grâce au sourire chaleureux du prestigieux orateur à la voix rocailleuse. Pour les néophytes, son discours fut des plus enrichissants, énoncé en termes simples sur la base d’un plan clair avec des illustrations percutantes comme savent les choisir la plupart des conférenciers américains. Sans oublier quelques traits d’humour discrets mais bienvenus.
Joseph Stiglitz est l’un des représentants les plus connus de la «nouvelle économie keynésienne» et il ne croit pas que les marchés s’équilibrent rapidement en suivant la loi de l’offre et de la demande. Selon ses théories les prescriptions usuelles négligeraient les problèmes structurels liés au fonctionnement des marchés.

ÉQUILIBRE ENTRE ACTION GOUVERNEMENTALE ET MARCHÉS
Le prix Nobel a d’abord évoqué l’asymétrie d’information, signifiant en économie que certains des participants disposent d’informations pertinentes inconnues des autres. Les dysfonctionnements de la sphère financière proviendraient de cette imperfection. S’ensuivrait une réglementation incontrôlée. On peut alors comprendre que si les gouvernements n’interviennent pas pour améliorer l’information afin de stimuler les marchés grâce à une évaluation juste des risques, les conflits d’intérêts se multiplieront et la situation continuera à dégénérer. Joseph Sigrist a également ajouté que le véritable débat aujourd’hui serait de trouver un équilibre entre action gouvernementale et marchés. Les deux se révèlent indispensables. Chacun est complémentaire à l’autre et cette balance devrait varier en s’adaptant à l’espace-temps.

INADÉQUATIONS COURANTES
L’économiste a ensuite énuméré certaines erreurs faites par l’approche standard qui confond le «coût du temps» et le «coût du risque», néglige les mesures de précaution, oublie que les états dont la nature a été détruite n’ont plus aucune ressource pour s’adapter au changement climatique et sous-estime l’importance de la biodiversité.

LA SOLUTION: LE GREEN NEW DEAL
Joseph Stiglitz préconise des MESURES D'URGENCE. Chaque pays devrait consacrer une part de son PNB pour aider l’économie à se transformer de manière écologique, car le dynamisme du marché ne peut y arriver seul. Le moyen de garantir le  plein-emploi consisterait à rétablir la relation entre capital et le travail. Une transition "verte" stimulerait l’économie grâce à des innovations technologiques. Ce processus, déjà enclenché en Europe, s’attaque au problème du changement climatique en investissant dans de nouvelles solutions. Le but: retrouver un équilibre en 2050.

LA GESTION DES RISQUES SOCIAUX
Joseph Stiglitz reconnaît que cette innovation technologique indispensable n’est pas dépourvue de risques sociaux. Le rôle des gouvernements consisterait donc à répartir équitablement les ajustements car certains groupes de travailleurs seront sacrifiés jusqu’à la mise en place des nouvelles industries. A long terme le problème serait résolu mais en attendant les citoyens ont besoin de soutien pour adapter leurs schémas de consommation.

En plus, une COOPÉRATION INTERNATIONALE est indispensable pour appliquer ce changement sans risques macro-économiques. Les APPROCHES MULTIDISCIPLINAIRES entre chercheurs sont nécessaires. Les discussions doivent s’engager entre les financiers et les représentants des travailleurs et des jeunes qui voient se profiler les inégalités.

ET APRÈS…
Même si le défi politique est énorme, cette proposition a le mérite d’être réaliste, car elle sait que les financiers écouteront ceux qui leur proposent un moyen de rendre son dynamisme aux marchés. Et la science ne nous donne-t-elle pas les moyens de réaliser un monde nouveau plus juste, plus propre, plus équitable si les financiers et les politiques comprennent la nécessité d’anticiper afin d’éviter une transition anarchique?
(L.H.A 20-01-2020)