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LA PETITE MENTEUSE

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UN ENGRENAGE PÉRILLEUX ET DEUX VICTIMES

Texte: Laurence Hainault Aggeler


«La petite menteuse» de Pascale Robert-Diard

Ce livre est l'un des livres qui a été discuté le mardi 25 octobre dans le cadre de notre manifestation: Les livres qu'on M: Le choix Goncourt de la Suisse.  Il a été présenté par Jing Rochman


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LISA A QUINZE ANS
C’est une adolescente en vrac, à la spontanéité déroutante. Elle a eu des seins avant les autres filles, ce qui excite les garçons dont elle devient la proie facile dans ce petit collège de province. Eux, n’ont «qu’une bite dans la tête» comme l’exprime crûment le meneur de la bande. Ils frôlent Lisa, flattent son ego avant de l’entraîner à leur faire un peu plaisir puis à l’humilier, la filmer à son insu. Se met en place une violence psychologique. Toujours au bord des larmes, Lisa s’emplit d’angoisse et de honte, elle se pense responsable.

ENGRENAGE DE L'IMPOSTURE
Quand on passe pour «une petite salope», comment déposer son statut de victime auprès des parents et des enseignants?  Les adultes pleins de trop bonnes intentions vont attendre des révélations, interpréter cette vérité complexe dont Lisa ne parvient à se dépêtrer. Ils vont la faire filer dans la mauvaise direction, et Lisa désigne un homme qui aurait abusé d’elle, Marco venu effectuer des travaux chez ses parents. L’ouvrier est condamné à dix ans de prison sans personne pour entendre qu’il clame son innocence. Lisa est taraudée par le remords, mais sa meilleure amie s’éloignait, tous la regardaient de travers, il fallait trouver une issue. Le viol provoque la commisération. L’adolescente se sent enfin moins seule.

ERREURS D'AIGUILLAGE
Trois ans après les faits, Alice, avocate de province, reçoit la visite de Lisa qui «préfère être défendue par une femme». Elle reprend le dossier de manière méthodique, cherche les erreurs d’aiguillage, les fausses pistes qui donnent le vertige et découvre la vérité́. Alice commence le procès le plus périlleux de sa carrière, celui d'une menteuse tout aussi victime que l’homme injustement condamné.

DU COLLECTIF À L'INDIVIDUEL
À l’heure où la littérature abonde en pénalistes flamboyants et malgré la force du questionnement collectif sur le viol, Pascale Robert-Diard refuse d'enlever sa légitimité au drame individuel. Vous plongerez dans ce réquisitoire. De manière percutante, il joue sur l’efficacité du style direct pour faire avaler d’une seule traite toute l’amertume d’une situation infernale. LHA

Publié le 31 octobre 2022