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PANORAMA
SOMMES-NOUS EN PASSE DE DEVENIR DES ÊTRES TRANSPARENTS DÉNUÉS D'ÂME?
Texte: Valérie Valkanap
Panorama, de Liliane Hassaine,
Gallimard 2023, 236 pages
En 2049, dans une ville où, pour des raisons sécuritaires, on a imposé la transparence jusque dans les bâtiments, une famille a disparu. Hélène, la narratrice, a été chargée de l’enquête. Elle remonte le cours des événements. On découvre à cette occasion les graves incohérences d’un monde qui se voudrait parfait. L’auteur a développé jusqu’à l’absurde les tendances actuelles (influenceurs et algorithmes guidant nos choix, smartphone encourageant notre paresse, opinions toutes puissantes, éradication de la presse, disparition des débats d’idées, télétravail scolaire, rigorisme moral de la jeune génération…). Le lecteur frissonne. Et si c’était ce qui nous attend?
Tout a commencé avec la Revenge week, semaine durant laquelle des milliers d’internautes s’estimant lésés dans leurs droits ont décidé de se faire justice eux-mêmes. À la suite des crimes postés sans vergogne sur les réseaux et pour rétablir l’ordre, un nouveau modèle de gouvernance, désormais aux mains du peuple, a été instauré: la transparence citoyenne. Grâce à un système fondé sur la vigilance des voisins et la généralisation des maisons-vivariums, on croit avoir éliminé la violence, du moins dans les quartiers modernes. Des zones de non-droit continuent cependant d’exister. L’auteure ne s’y attarde pas, mais on se les figure sans autre règle que la loi du plus fort.
On loue l’imagination de Liliane Hassaine (le lit-cercueil pour faire l’amour loin des regards est non seulement une trouvaille amusante, mais on comprend tout de suite que c’est un tue-l’amour). La fin est un peu tirée par les cheveux (comme il arrive souvent dans les enquêtes criminelles) mais la réflexion à laquelle le roman invite prévaut. La narratrice l’affirme sans ambages: «L’utopie d’une société sans secrets nous condamne au mensonge».
V.V. 26.06.25
Publié le 30 juin 2025
