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LA BLANCHE DAME N'EST PAS UN MONUMENT

Et dans sa traduction en allemand...
DOULEUR, VICTOIRE ET QUESTIONNE-
MENTS
Texte: Valérie Valkanap
NOTRE-DAME DE PARIS, Ô reine de douleur, Ô reine de victoire,
de Sylvain Tesson
109 pages, éditions Equateur, novembre 2024
En hommage à la cathédrale de Paris qui brûla le 15 avril 2019, Sylvain Tesson nous livre un bien beau recueil. S’il écrit sur la «blanche dame», c’est qu’il s’en sent proche.
Tout d’abord, c’est sa voisine, il habite dans son quartier. Ensuite, mû par une passion aussi irrépressible que dangereuse (sans cordes pour se sécuriser, sinon à quoi bon fanfaronner), il a escaladé ses tours, en «collectionneur d’aventures aériennes». Chasseur d’étoiles ou alpiniste en manque de montagnes? Toujours est-il qu’un soir de «gaudriole» sur d’autres toits, une chute terrible a mis fin à sa marotte. Après quatre mois allongé, il a choisi les escaliers en colimaçon de Notre-Dame comme terrain de rééducation. Durant cet astreignant exercice quotidien, il n’élève pas que son corps. Sa tête prend la distance nécessaire à la réflexion (sur la vie précieuse qu’il ne faut pas brader, sur le prochain siècle qui sera peut-être celui de la chlorophylle, sur les touristes qui «brandissent un écran entre le monde et eux»…).
Sa poésie nous touche, comme lorsqu’il évoque les «chemins de traverse» découverts dans la charpente de la cathédrale grâce au passage d’animaux ou ces trous par lesquels il sent «l’haleine de l’église».
Son dernier texte parle du feu qui de tous temps exerça une fascination archaïque sur l’homme. Le lecteur y voit un avertissement: le feu (ou tout autre cataclysme) se chargera de nous rappeler ce que nous voulons ignorer. A savoir que l’humanité est devenue une «termitière gigantesque, pressurée, hyper-tendue, frénétique» prête à exploser.
V.V., 7.07.25
